Avec deux médailles de bronze, l’équipe de France paralympique d’aviron affiche un bilan positif. Sans oublier que l’ensemble de la flotte tricolore est entré en finale A.

On savait que le bilan de l’équipe de France paralympique serait différent de celui des olympiques… En fait, on l’espérait. Car rien n’est jamais acquis dans le sport, tant les facteurs pouvant interférer avec la performance peuvent être nombreux, on le verra plus tard, même s’ils ne changent pas forcément le résultat final.
Car c’est bien de performance dont on parle, dont les athlètes souhaitent parler. Comme l’a dit Perle Bouge, « le para-sport a besoin que le public et les médias connaissent la performance des para-athlètes, on ne parle pas de handicap, on parle de performance. Les gens viennent voir de la performance. Si on communique de plus en plus dessus, sur nos athlètes, le public va s’y intéresser de plus en plus. Le CPSF et le Cojo œuvrent pour ça. En effet, il y a des parcours de vie, des histoires, mais il y a de la performance, il y a du sport, on a envie qu’on parle de performance sportive, des médaillés, mais pas que des médaillés, car il y a des gens qui s’entraînent tous les jours, on a des jeunes. Il faut donner envie à des personnes de venir pratiquer, de découvrir nos sports ».
Des Jeux paralympiques réussis
Le public français ne voulait pas rester sur sa frustration à Vaires-sur-Marne, où seul le canoë-kayak a rapporté des médailles durant Paris 2024 – acte I. Car c’est bien d’un deuxième acte dont on peut parler avec des Jeux paralympiques. Deuxième acte car, comme pour les Jeux olympiques, chaque session était introduite par les fameux coups de bâton du théâtre. Parce que l’équipe de France ne faisait qu’une et qu’on a envie d’y croire : on a pu voir Laura Tarantola ce matin, en tribune, venue de Grenoble pour voir les finales. Et parce que le Cojo a mis énormément d’envie et de moyens dans la tenue des Jeux paralympiques. « Ca me fait plaisir de voir tous les sites de compétition avec la même effervescence, confiait Tony Estanguet, président du Cojo Paris 2024, avec du monde, avec des athlètes qui donnent tout, se dépassent. Tout le monde est à son poste, concentré, on les sent sereins, souriants. Il y a eu un gros travail en amont pour que tout le monde vive bien cet événement ».
Sur les dix premiers mois, à peine un million de places avaient été vendues avant le début des Jeux, avec une vraie accélération dès le début des Olympiques. « Il y a eu une vraie accélération après la cérémonie d’ouverture paralympique, poursuit Tony Estanguet, avec nos meilleures ventes par jour. Le public français est là, présent, pas en spectateur passif mais avec la même magie qu’on a vécue lors des Jeux olympiques, avec une vraie envie de s’approprier cet événement, avec un sentiment d’unité ».
La satisfaction du clan français
Cinq bateaux qualifiés entre Belgrade et Lucerne… Une flotte complète au regard du programme paralympique qui compte cinq disciplines. Du jamais vu auparavant pour les Français, et déjà une performance unique à Paris, la France étant la seule nation à y être parvenue.
Au terme des repêchages, les cinq bateaux tricolores ont tous remporté leur ticket : une nouvelle performance dont peuvent s’enorgueillir les athlètes paralympiques. Mais au fur et à mesure des années, le niveau est monté, la densité est là. On ne voit plus des courses où un ou deux bateaux caracolent en tête, suivi d’un autre, puis d’un autre, avec des écarts conséquents. La photo finish a chauffé à plusieurs reprises durant ces Jeux paralympiques, elle a notamment servi trois fois ce matin pour déterminer les podiums.
Ce fut notamment le cas en finale du skiff féminin PR1 dans laquelle concourait Nathalie Benoit pour savoir qui d’elle ou de sa rivale norvégienne décrocherait l’argent. Le bronze est finalement revenue à la tricolore qui a construit son parcours, dans le deuxième 1000 au coup par coup, remontant ainsi de la quatrième à la troisième place, tandis que l’Ukrainienne, partie fort derrière l’Israélienne, lâchait prise. « J’ai tout donné, commente Nathalie benoit, je n’aurais pas pu faire un coup de plus. J’ai essayé de ne lâcher aucun coup, je savais qu’il faudrait remonter tout ça. Au 1000, J’ai commencé à en mettre un peu plus, je suis heureuse de cette construction de course qui s’est faite dans la sérénité, sauf dans les 50 derniers coups, j’ai fait une fausse pelle, mais je me suis dit que tant que la ligne d’arrivée, rien n’est fait ». Pour la suite, même si elle a annoncé mettre un terme à sa carrière internationale, comme l’a dit Charles Delval : « quand elle a débarqué, je lui ai dit que je la rappellerai dans deux ans pour revenir ». Même elle n’a pas fermé la porte à l’aviron !
Photo finish également en finale du quatre barré mixte PR3, cette fois-ci pour savoir qui monterait sur la troisième marche du podium et qui n’aurait droit qu’à la médaille en chocolat. Et c’est la France, pour six centièmes, qui a débarqué au ponton d’honneur. « On ne le savait pas en franchissant la ligne, commentait Grégoire Bireau, on l’a vu en regardant l’écran. C’était long ! » Candyce Chafa, Rémy Taranto, Grégoire Bireau, Margot Boulet et leur barreuse Emilie Acquistapace ont su s’installer solidement en troisième position et contrer les attaques des Allemands. « Il fallait être offensif et attaquer, explique Emilie Acquistapace, parce qu’on s’est un peu laisser rouler dessus en série. On était tous les cinq remontés pour marquer le coup. On fait un premier 500 avec quatre collés, sur le 1000 du milieu on met l’écart avec les Allemands et heureusement, car sur le dernier 500 ils nous remontent. On a mis en place un coup de patte, une façon de ramer, car le bateau est mixte, les handicaps sont différents ». Là encore, chacun va prendre des vacances, et attendre ce qui sera décidé au niveau fédéral pour la suite et l’olympiade qui va s’ouvrir très prochainement.
Déception pour Alexis Sanchez qui a terminé à la sixième place de la course, mais a finalement été classé cinquième, suite à l’exclusion du skiffeur italien pour l’usage d’un moyen de communication, interdit par les règles de World Rowing. Déception à chaud, mais comme il l’admet lui-même, à froid il réalisera qu’après moins de deux ans d’aviron à haut niveau, parvenir à entrer en finale paralympique est déjà une première réussite. Et il ne cache pas sa hâte de retourner rapidement à l’entraînement et de mettre à profit cette expérience.
Déception également pour Benjamin Daviet et Perle Bouge, avec le sentiment d’un travail inachevé. Ou d’une non-course, comme ils l’ont tous les deux qualifiés. Ils avaient déjà l’impression, en série, d’avoir offert la qualification à leurs concurrents, et la finale leur laisse un goût amer, celui de ne pas avoir ramé. Quant à l’avenir, Benjamin Daviet a déjà annoncé se focaliser sur les Jeux d’hiver 2026, sans rien présager pour Los Angeles. Perle Bouge a déjà annoncé qu’elle ne prendrait pas part à un projet qui repartirait à zéro
Déception et frustration aussi pour Guylaine Marchant et Laurent Cadot. Même si les deux athlètes étaient conscients du niveau de la concurrence qui – comme le rappelait le rameur de Boulogne 92 – a fortement augmenté depuis son titre de champion du monde de la discipline en 2022, un paramètre extérieur a impacté leur parcours. A deux reprises, ils ont été gênés par des algues, particulièrement dans le dernier 500 où elle s’est accrochée à la dérive, poussant Laurent Cadot à lever le bras et la France à déposer une réclamation. Un facteur qui les a empêchés de s’exprimer pleinement, et a ajouté de la frustration aux deux athlètes.
En bref, c’est entre joie et déception que s’est achevée cette régate paralympique pour les Français.
Retour détaillé dans le numéro 60 de Mag Aviron.