Aujourd’hui, ils sont cinq Grenoblois à porter les couleurs de l’équipe de France d’aviron. Trois d’entre eux ont d’ores et déjà gagné leur ticket pour Paris, deux seront en lice à Lucerne pour la régate finale de qualification olympique.

C’est une grande première pour l’Aviron Grenoblois. Déjà lors de la précédente olympiade, le club isérois avait quatre représentants aux Jeux olympiques de Tokyo : Emma Lunatti, Laura Tarantola, mais aussi Guillaume et Thibaud Turlan. « On avait déjà eu une situation similaire lors des Jeux d’Athènes en 2004, se souvient Alain Waché, responsable sportif de l’Aviron Grenoblois, mais il y avait eu des arrivées d’athlètes ».
Les rameurs et rameuses du club ont toujours réussi à se frayer un chemin vers l’équipe de France, voire à inscrire leur nom sur la coulisse d’un bateau aux Jeux. Un parcours qui dénote le caractère particulier de la formation grenobloise, dont Alain Waché, en tant qu’architecte, ramène l’origine à ce qui se passe au sein du club. Pour lui, tout est parti d’un titre de champion de France pour un de ses bateaux, en 1993. « En tant qu’entraîneur, j’avais bossé comme un fou pour avoir ce titre, explique-t-il, à la fin avec le groupe, on l’a eu. J’ai eu comme l’impression de passer un cap, d’avoir acquis un savoir-faire qui permettait de reproduire ça. Ensuite, on en a enchaîné, je ne saurais même pas dire combien ».
Entre certitudes du travail acquis et travail accompli, le résultat parle de lui-même. « Je me souviens d’une discussion avec Jérôme Prabonnaud du Cercle de l’Aviron de Lyon. Je me disais que maintenant, pour ma carrière d’entraîneur, c’était bon. Tout le reste, c’est du bonus ». Pour lui, la hiérarchie des clubs n’a pas vraiment d’importance. « Je n’ai jamais été un féru du classement des clubs, même si certains s’y intéressent, cela n’a jamais été ma tasse de thé. Ce ne sont que des chiffres, ce n’est pas ça qui est important. Certains disent que pour les collectivités, cela joue, nous elles s’ne moquent. Ce n’est pas leur critère pour nous donner des fonds. En termes de réussite, des athlètes aux Jeux, c’est tellement énorme ». Et de rajouter en riant : « je ne sais pas si je suis blasé ou si j’ai pris un peu le chou ».
Le chou, il pourrait le prendre. Car de quatre à Tokyo, on pourrait passer à cinq à Paris. C’est déjà fait pour Emma Lunatti, pur produit grenoblois, qui a qualifié le deux de couple féminin avec Margaux Bailleul. « Elle est arrivée en minimes dans le cadre d’un programme de détection, puis elle est partie en sports études ski. Elle est revenue en juniors ». Si Alain Waché aime bien conserver de la proximité avec ses athlètes, il reconnaît volontiers que le départ pour l’Insep a été positif pour Emma. « Dans ce cas, le contexte mis en place autour d’elle à Paris correspondait à ce dont elle avait besoin à ce moment-là et qu’au niveau du club, je n’aurais pas pu mettre en place ». Mais l’entraîneur conserve un lien très fréquent avec sa rameuse.
Pour Laura Tarantola, c’est l’inverse. « Laura a fait son bonhomme de chemin chez nous, explique Alain Waché, elle est arrivée à une période où l’on avait un groupe dense avec Noémie Kober, Léa Duret… des filles énormes avec lesquelles elle s’est challengée. Elle a su corriger son aviron, on l’a beaucoup aidée. Laura ne fait pas de bruit, mais elle sait s’entourer, s’organiser en s’appuyant sur des gens ». Des gens dont fait partie Alain Waché. « On échange régulièrement et quand elle est dans le dur, elle retourne aux sources ». Jusqu’à Tokyo, elle s’entraînait sur Grenoble, avant de prendre pension au pôle de Lyon. « Il a fallu gérer l’après médaille, mais on a pris du temps pour en discuter. En décembre 2022, elle n’allait pas bien techniquement, on a travaillé sur la vidéo, en remontant jusqu’en 2018-2019, et au final, ça s’est bien passé. Après la déception de Belgrade, on s’est beaucoup vus, on a beaucoup discuté ».
Trois autres Grenoblois sont en équipe de France : Guillaume et Thibaud Turlan et Ferdinand Ludwig. Ils n’ont certes pas été formés au club, mais cela n’empêche pas Alain Waché de garder un œil sur eux. « En sachant que tout peut arriver pour chacun d’eux lors des Jeux, même si pour Ferdinand il reste le passage par Lucerne ».
Le rôle du coach a donc toute son importance dans la gestion de l’athlète. Et Alain Waché ne compte pas son temps, ni la charge de la batterie de son téléphone lorsqu’il s’agit de rester en contact avec ses rameuses et rameurs.
Une sélection, c’est bien. Mais les médailles comptent également. Et l’Aviron Grenoblois a pu compter sur les vingt dernières années sur deux belles récompenses pour ses athlètes : l’or en quatre sans barreur poids léger à Sydney en 2000 pour Xavier Dorfman, et il y a bientôt trois à Tokyo l’argent pour Laura Tarantola. « Quand on va aux Jeux, on est exceptionnel, car ce n’est pas à la portée de tout le monde. Mais il a aussi ce côté encore plus fantastique, celui de décrocher une médaille ».