Il y a quelques jours, Jacques Morel était nommé « Gloire du sport français 2022 » par la Fédération des internationaux du sport français. Une haute distinction pour cet athlète dont l’humilité l’avait poussé à refuser des années durant la grande médaille d’or de la FFA. Mag Aviron l’avait rencontré il y a 8 ans, sur les bords du bassin d’Arcachon, et vous propose de revivre cette rencontre.

L’aviron est bien souvent une histoire de famille, comme ce fut le cas pour Jacques Morel. Né le 22 septembre 1933, Jacques est d’origine modeste et a commencé à travailler très tôt, dès l’âge de 14 ans. « Mon frère aîné m’a fait découvrir l’aviron, raconte Jacques Morel, au club d’Arcachon. Ca m’a plu tout de suite, les sensations sur le bateau. J’ai commencé comme cadet, il n’y avait pas de minimes, puis j’ai continué en junior et en senior. J’ai toujours aimé la compétition, mais jamais je n’aurais pensé aller un jour aux jeux olympiques, même si j’en rêvais ». Et pourtant, la carrière sportive de Jacques Morel monte vite d’un cran, à l’international. En 1960, il participe à des régates à Francfort, Gand, Ostende. « La fédération n’était pas structurée comme maintenant, commente-t-il, il n’y avait que des bénévoles dévoués, l’un d’eux avait même conçu la remorque qui transportait les bateaux ; il y a eu une énorme évolution depuis ». En 1960, Jacques effectue également son premier déplacement à Lucerne en quatre de pointe avec barreur et remporte un précieux sésame : une sélection olympique pour les jeux de Rome à l’été 1960. « On était la discipline avec le plus de concurrents, se souvient Jacques, mais on ne s’y attendait pas ». Première consécration pour lui en effet : une médaille d’argent avec à ses côtés dans le bateau Robert Dumontois, Claude Martin, Guy Nosbaum et Jean Klein. En 1962, il évolue au 3 du huit français pour les premiers championnats du monde de Lucerne. 1964 : jeux olympiques de Tokyo. Jacques Morel évolue en deux de pointe avec barreur avec son frère Georges, barré par Jean-Claude Darouy. « J’en rêvais de décrocher cette médaille, se souvient-il, on était champions avant l’heure ». La météo en a décidé autrement. Le vent très important oblige à arrêter les épreuves et change de sens, défavorisant le couloir des Français. Les bateaux suiveurs font de la vague. A l’arrivée ce sont les Américains qui décrochent l’or, les frères Morel récoltent l’argent. On sent encore l’émotion dans sa voix, les souvenirs sont toujours très forts chez Jacques Morel. « J’en rêvais de cette médaille olympique, se souvient le rameur, ces jeux je les ai vécus à outrance ». Jacques Morel a connu une belle carrière internationale. Mais comme il le dit lui-même, « l’aviron c’est beau, mais ça ne rapporte pas d’argent ». Travaillant très jeune pour soutenir sa famille, il a également connu l’ostréiculture, le train de la marée qui emmenait les produits de la mer un peu partout à travers la France. Egalement entraîneur à Arcachon, il a ainsi connu Pascal Touron, un autre rameur international des années 90 et 2000, mais aussi un certain Thierry Louvet, à l’époque où il réparait les avirons dans un petit atelier, bien loin de l’époque actuelle et de Concept2.
Les anciens athlètes comme Jacques Morel sont non seulement la mémoire vivante de l’aviron, mais aussi une partie importante de son histoire, écrivant dans le marbre quelques-uns des plus beaux palmarès.