La saison des U19 et des U23 s’est achevée à Varèse avec un double championnat qui a rassemblé plus de 1400 athlètes. La France en est revenue avec quatre médailles sur les deux catégories. Rétrospective sur un événement à rebondissements.

En 2016, Rotterdam accueillait, dans la foulée des Jeux olympiques de Rio, trois championnats en un : les U19, les U23 et les seniors pour les disciplines non olympiques, avec un programme réparti sur sept jours durant lesquels les différentes catégories s’alternaient sur le Willem-Alexander Baan. Un véritable marathon d’aviron, aussi bien pour les organisateurs qui doivent gérer les flux et l’afflux de participants, les équipes nationales pour qui c’est un défi logistique, que World Rowing qui mobilise ses équipes sur un format de compétition conséquent.
Cette année, la fédération internationale avait décidé de réitérer l’expérience en regroupant les mondiaux U19 et U23. Varèse en avait décroché l’organisation. La ville lombarde avait déjà récupéré in extremis les championnats d’Europe U19 après la défection de Sabaudia.
Une fois n’est pas coutume, mais cela pourrait le devenir : il semblerait que cela ne se bouscule plus trop au portillon pour organiser des mondiaux ! Il faut dire que le cahier des charges imposé par World Rowing est drastique et conséquent : tous les détails sont abordés au fil des centaines de pages du document à appliquer stricto sensu, des aspects techniques aux modalités d’hébergement en passant par la vente de produits dérivés ou la restauration … De quoi en effrayer plus d’un, même si les organisateurs s’accordent quelques libertés une fois que la compétition leur a été attribuée, avec le défi très relevé que tout se passe pour le mieux malgré l’important nombre d’athlètes à gérer.
Car qui dit deux championnats en un dit délégation conséquente : pour la France, ce sont six bateaux en U19 et douze en U23 qui ont été emmenés à Varèse, soit près de 80 rameurs, rameuses, encadrants, personnels médicaux et paramédicaux… L’espace réservé aux Bleus dans le parc à bateaux, sous les arbres qui bordent le lac, était parfois encombré, et les deux tentes semblaient petites. Mais la chaleur qui a régné durant la semaine de compétition était davantage propice à se réfugier à l’ombre d’un arbre pour se détendre avant la course ou récupérer sur l’ergomètre. La palme revient néanmoins à l’Italie bien sûr, qui a engagé chez elle deux équipes complètes, suivie de près par l’Allemagne et les Etats-Unis qui ont fait quasiment de même, offrant à leurs rameuses et rameurs l’occasion d’affronter leurs homologues étrangers.

L’heure du bilan
Ce sont les U23, avec leurs 22 classes de bateaux, qui ont ouvert la compétition à Varèse dès le 25 juillet, en fin d’après-midi, pour les premières séries : celles des skiffs open et poids légers, ces disciplines comptant plus de 24 partants chacune, aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Deux jours plus tard, les U19 entamaient leurs championnats, pour les terminer le dimanche, seuls sur le lac de Varèse, pour une dernière consacrée aux finales de classement et aux grandes finales, terminant comme c’est la coutume par le bateau roi : le huit.

Du côté U23, l’équipe de France comptait douze embarcations. Le quatre barré avec Nicolas Armenjon, Mathis Nottelet, Noam Mouelle et Tom Puybaraud et la barreuse Alix Bouscasse de Saint-Aignan n’a pas passé le cap des repêchages ; avec seulement sept engagés dans la discipline, pas de finale B, mais l’on peut considérer qu’il a terminé à la septième place des mondiaux.
Quatre bateaux n’ont pas passé le cap de repêchages ou de leurs demi-finales. En deux sans barreur, Clara Valinducq et Pauline Rossignol terminent neuvièmes des championnats, Mathias Meriguet et Emmanuel Mathieu onzièmes. En huit, Simon Vandercoilden, Ethan Chouraqui, Victor El Kholti, Dorian Marques-Vigneron, Awen Thomas, Nikola Kolarevic, Armand Pfister, Florian Ludwig et leur barreuse Alexandra Boistard-Lavenir remportent la finale B, Martin Bauer arrive sixième de celle du skiff poids léger.
Sept bateaux sont entrés en finales A, et ce sont les poids légers qui ont débloqué par les poids légers le vendredi après-midi, lors de la première session de finales consacrée aux catégories non olympiques… même chez les U23, on fonctionne comme en élite !
Et l’on peut noter une coïncidence entre les deux finales dans lesquelles les Français ont été médaillés : l’ordre des nations est identique aussi bien chez les hommes que chez les femmes avec l’Italie en or, l’Allemagne en argent et la France en bronze. Autre point commun, cette fois-ci entre les embarcations tricolores : les athlètes ont tout donné, tout mis dans la course. Si Noémie Sepe, Marion Chagnot, Eugénie Bertrand et Inès Boccanfuso avaient suffisamment d’écart avec les Américaines pour s’assurer leur place sur le podium, Léo-Paul Fiacre, Antoine Lefebvre, Louis Pruvost et Clément Mariot ont dû batailler plus sérieusement pour laisser l’Oncle Sam derrière eux. Tous sont allés au bout d’eux-mêmes, il suffisait de voir leur épuisement lors de leur débarquement au ponton d’honneur. Le prix à payer fut lourd, mais au moins, la France empochait ses deux premières breloques.

Le samedi, c’est un autre bateau poids léger, qui ajoutait sa pierre à l’édifice : le deux de couple poids léger de Pierrick Verger et Baptiste Savaete avec le bronze. Et ce fut la seule médaille de la journée. Une fois de plus, les PL sauvaient la mise. Le secret : un fonctionnement de groupe, au-delà de la catégorie d’âge.
Il est vrai qu’on est passé à pas grand-chose de décrocher d’autres médailles, quand on voit les résultats enregistrés lors des séries et demi-finales : Romain Harat qui a finalement terminé cinquième alors qu’il a remporté série, quart et fait deuxième de sa demie, Yoann Lamiral et Samuel Arque deuxièmes de la demi-finale du deux de couple masculin, Gaïa Chiavini et Jeanne Roche troisièmes de la leur chez les femmes, Mya Bosquet, Joséphine Cornut-Danjou, Agathe Oudet et Fleur Vaucoret en quatre sans barreur qui avait gagné sa place en finale A dès les séries… Tous ces bateaux ont finalement fini cinquièmes des championnats U23.
Pour le directeur technique national Sébastien Vieilledent, le groupe reste sur sa faim. « Il y avait la même flotte qu’à Racice en 2021, sept bateaux sur douze entrent en finales A avec trois médailles soit une de plus que l’an passé, les résultats sont probants et on reste stable sur notre capacité à ramener des médailles sur les catégories olympiques. Pour les autres, on ne passe pas loin, ça n’a pas souvent souri dans le bon sens et on passe à côté d’un très bon résultat U23. Athlètes, entraîneurs et fédération, tout le monde reste sur sa faim. Je reste impressionné par Romain Harat qui, toute la semaine, a réalisé des courses de très haut niveau. On était à deux doigts de basculer sur deux médailles de plus, on retrouve un niveau de performance.
Le lendemain, le clan français nourrissait plusieurs espoirs de médailles… qui n’ont pas tous été exaucés. Pour la plupart d’ailleurs.
Le bilan en chiffres en U19
Du côté des U19, même si deux bateaux ont dû passer par les repêchages, tous sont parvenus à se hisser en demi-finales mondiales. Et encore mieux pour deux d’entre eux – le huit masculin de Pierre Czerwik, Alexis Rose, Alexandre Jolard, Maxime Eymard, Lucas Fauché, Pierre-Esteban Soubeste, Louis Descot-Vigouroux et Harry Fisher et la barreuse Lucie Mercier, et le quatre sans barreur féminin de Léa Herscovici, Caroline Lagarde, Léontine Fouquet et Jeanne Sellier – qui, dès les séries, ont gagné leur ticket pour les finales A, en raison du nombre d’engagés ; la palme revenant au huit qui avait remporté son éliminatoire de plutôt belle manière. Le 30 juillet, en demi-finales, le bilan fut plus que mitigé : seul un bateau, le deux de couple féminin de Salomé Degeorges et Milla Massemin, est parvenu à entrer en finale mondiale, alors que l’on en espérait davantage au regard des courses précédentes. Pierre Molins passait à côté de sa demi-finale, mais se rattrapait le lendemain en remportant la finale B. Pierre Picquet-Egly et Youenn Mer-Appere, en deux sans barreur, terminent à la cinquième place de la B, eux qui à la base étaient remplaçants du huit, mais avaient été engagés suite au parcours handicap. En deux de couple, Alric Rodrigue et Come Gonzalez terminent à la deuxième place de la finale B.

Et c’est le quatre sans barreur féminin qui aura décroché le bronze, le deux de couple féminin terminant cinquième de sa grande finale et le huit sixième de la sienne.
On se souvient tous des Europe il y a deux mois, et des mondiaux de Plovdiv en 2021, avec des résultats historiques. C’est donc tout en nuances que Sébastien Vieilledent est revenu sur les résultats de Varèse. « 2021 a été une année exceptionnelle ; 7 bateaux étaient engagés à Plovdiv, 6 étaient en finales A, on avait remporté 5 médailles, soit 70 %. Des résultats historiques et exceptionnels qu’il faut réinscrire dans un contexte post-covid, avec des nations absentes, mais cela n’enlève rien à la valeur des médailles. Cette année, on avait 6 bateaux, 3 qui passent en finales A, 1 médaille ; factuellement, c’est moins bon qu’en 2021, mais ça reste dans des dynamiques favorables et intéressantes. Il faut se souvenir qu’avant, on était sur des années de disette en termes de résultats. Cela aurait pu être meilleur, mais on a fait des choix pas anodins comme celui du huit. Quand on met un huit en bateau 1, on s’enlève forcément des cartouches sur des bateaux plus courts. Mais c’est une belle aventure pour Paris 2023, on peut souligner le travail des rameurs et Gilles Bosquet. Les choix ont été judicieux et permettent d’embarquer un travail de la pointe, du collectif, d’emmener un maximum de personnes vers Los Angeles 2028. Le quatre sans barreur a fait un bon résultat, avec des rameuses d’avenir dans des standards internationaux intéressants au niveau des gabarits, et on peut voir que les Américaines favorites passent au travers. Pierre Molins ne passe pas en finale pour 10 centièmes… De tout ça, on ne peut pas s’en satisfaire pleinement quand on a été une nation à cinq médailles, néanmoins, il faut souligner les médailles, la préparation du collectif, les belles places en finales A, et rester à l’attaque pour Paris 2023. Il faut aussi regarder en face aussi les points à travailler ; on a vu des nations comme l’Italie, la Grèce… très engagées dans la compétition, avec la capacité de tenir des rythmes de courses importants. On montre qu’on n’a pas été décrochés du très haut niveau international. Il y a un manque de finition globale ».
Globalement, si le DTN trouve que le bilan est bon, il concède tout de même que la France aurait pu faire mieux : « On ressort du week-end sur notre faim, il y avait le potentiel de faire mieux que ça, mais on n’a pas eu le petit bout de réussite qui aurait fait basculer les résultats du bon côté. Mais ça ne veut pas dire que les objectifs ne sont pas atteints ».
Des supporters omniprésents
On ne peut pas parler de Varèse sans parler des supporters français. Dès le lundi, ils étaient présents sur les bords du lac pour encourager les équipages tricolores en lice, et leur nombre a grossi au fur et à mesure de la compétition, se créant même un mini Club France dans les 500 derniers mètres duquel ils n’hésitaient pas à donner de la voix. Ils ont également rivalisé d’originalité sur les accessoires permettant d’identifier, aux yeux de tous, la nation tricolore. Après deux années de Covid-19 et de huis clos sur les championnats, le club de supporters – créé en 2015 avec l’aide de Mag Aviron – a décidé de reprendre du service sur Varèse et Racice en septembre.
Au global, chacun est d’accord pour dire que les Français sont rentrés de Varèse avec un petit quelque chose qui manquait, un « je ne sais quoi » comme nous l’empruntent souvent les Anglo-saxons. Il va falloir maintenant transformer l’essai de la transition des U19 vers les U23 pour certains, et des U23 vers le groupe senior A pour d’autres.
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